A destination des institutions principalement, ASA Handicap mental a développé une formation en FALC sur le système politique suisse. Explications d’Anne-Sophie Kupper, responsable du programme Droits & Participation.
Dans quel contexte est née cette formation ?
J’ai réalisé mon travail de mémoire en travail social sur le droit de vote des personnes ayant une déficience intellectuelle accueillies en institution. Dans ce cadre, j’avais interviewé des personnes dans plusieurs institutions. J’avais constaté le manque d’informations sur le système politique. Des explications sur le processus pour avoir le droit de vote faisaient également défaut. Au niveau politique, il y avait une réflexion dans plusieurs cantons autour du droit de vote des personnes ayant une curatelle de portée générale. L’acceptation de la votation genevoise fin 2020, avec davantage de personnes qui auraient le droit de vote, est ensuite venue renforcer ce besoin.
Des informations existent déjà en FALC, notamment sur les votations …
Un soutien plus global était nécessaire : les personnes doivent comprendre pourquoi on vote, comment on fait pour voter, dans quoi cela s’inscrit et que veut dire être un citoyen. Nous avons ainsi choisi de découper notre formation de deux journées en trois modules : « C’est quoi la Suisse ? », « Moi comme citoyen », « Comment je fais pour exercer mon droit de vote ? ».
« Les personnes doivent comprendre pourquoi on vote, comment on fait pour voter, dans quoi cela s’inscrit et que veut dire être un citoyen. »
Anne-Sophie Kupper, responsable du programme Droits & Participation d'ASA Handicap mental
Que contiennent plus concrètement ces trois modules ?
Lors du premier, nous abordons la notion d’Etat. Nous voyons que la Suisse est un territoire avec une population dans lequel il y a des règles pour pouvoir vivre ensemble ainsi qu’une organisation pour le gérer. Nous abordons la Constitution ainsi que les trois pouvoirs. Avec la notion de fédéralisme, on voit qu’il y a des décisions pour toute la Suisse et d’autres pour les cantons et les communes. Les partis politiques sont aussi expliqués : qui sont les personnes qui gouvernent notre pays et comment les choisit-on ? Le module 2 est axé sur les différentes participations citoyennes possibles : dans un comité, au sein d’une association ou encore en travaillant dans un atelier protégé. Nous zoomons ensuite sur la participation politique : que peut-on faire ? Par exemple donner son avis sur certains sujets ainsi que voter ou élire des personnes. Nous expliquons la législation cantonale en vigueur en matière de droit de vote. Si la formation est donnée dans le canton de Vaud, cela implique d’expliquer le mécanisme visant à restituer le droit de vote à la personne. Dans le dernier module, nous voyons comment utiliser le matériel de vote.
Comment rendre accessibles des informations a priori complexes ?
Partir des connaissances des personnes pour leur apporter des compléments est le concept pédagogique de la formation. Lorsque l’on explique que la Suisse est un territoire, nous utilisons une carte interactive sur laquelle les participants peuvent cliquer sur les cantons qu’ils connaissent. S’il s’agit de participants vivant en institution, nous faisons le parallèle entre l’organisation de celle-ci et celle du pays. Des articles de presse résumés et traduits en langage simplifié nous servent à illustrer les différents pouvoirs. Il est important de donner un aspect concret à la manière dont s’organise la vie en société. Enfin, les retours des participants lors de la phase test nous ont incités à utiliser davantage de vidéos ainsi que des spidermaps pour les partis politiques.
Les personnes ayant participé à la formation votent-elles désormais plus souvent ou de manière plus éclairée ?
L’objectif de la formation est d’encourager les personnes à voter. Mais aussi, plus généralement, qu’elles comprennent le fonctionnement d’une société et qu’elles soient intégrées d’une manière ou d’une autre. Lors des votations cantonales genevoises sur la réforme du cycle d’orientation, une institution avait organisé la visite d’un cycle avec des explications simples, indiquant que si la réforme passait, les élèves « les plus forts » seraient séparés des « moins forts ». Les participants ont pu prendre position et en ont débattu dans leur famille. Dans une institution, les résidents ont voté pour choisir un tapis pour la salle commune. Que l’accent soit mis sur l’aspect collectif amène une autre réflexion sur la participation et la prise de décision. A l’issue de la formation, deux participants vaudois ont entrepris des démarches pour que leur droit de vote leur soit restitué.
Comment s’inscrire à la formation ?
Pour les personnes au bénéfice de l’AI, la formation est actuellement proposée en partenariat avec l’association Actifs (GE). Concernant les institutions, elles peuvent directement contacter ASA Handicap mental à l’adresse info@asahm.ch ou au 022 792 48 65. Une adaptation de la formation aux besoins des personnes ayant des difficultés de langage est envisagée.