Accompagnement à la participation politique en institution

Auteur

Sarah Cornaz

Publié le

Les Etablissements publics pour l’intégration (EPI) à Genève ont mis sur pied un accompagnement à la participation politique. Rencontre avec deux éducatrices passionnées et passionnantes des EPI :  Pilar Blanco, cheffe du secteur aux Services socio-éducatifs et de Sandra Rigotti, maîtresse d’atelier aux Services socioprofessionnels.

Mise en place d’un accompagnement à l’interne

Sandra Rigotti  : Chaque votation amène des questions, notamment en termes d’éducation citoyenne. Nous évoluons avec des personnes qui n’ont pas l’habitude que leur avis soit demandé !

Pilar Blanco  : La population genevoise a accordé le droit de vote à toutes et tous mais nous n’avons pas pensé à « l’après ». Préparer à la citoyenneté active demande une formation à l’autodétermination et aux habilités communicationnelles mais demande aussi des outils spécifiques et des informations qui permettent à tous et toutes de faire des choix en comprenant les tenants et aboutissants de ceux-ci. Un de nos objectifs est de mettre sur pied un groupe cantonal.

La population genevoise a accordé le droit de vote à toutes et tous mais nous n’avons pas pensé à « l’après »

Nous nous devons de préparer des documents pour tous les objets soumis à votation. Nous avons créé dans un premier temps un lexique, que les personnes avec déficience intellectuelle ont choisi d’appeler « dictionnaire ». Ce dictionnaire inclut tous les termes en lien avec la politique au sens large (Grand conseil, Chancellerie, Conseil Fédéral etc.).

Sandra Rigotti  : Nous devons partir de leur propre vocabulaire tout en restant très factuels et concrets. Chaque question en amène une autre, c’est un peu comme les poupées russes et c’est ce qui rend ce projet absolument passionnant !

 

Les soutiens externes

Pilar Blanco  : L’État a mis en ligne un document sur le « comment voter » en FALC avec des pictogrammes et des vidéos. Ces outils sont très utiles mais nous nous sommes rendues compte que l’on ne peut pas atteindre toutes les personnes car le niveau de compréhension est très hétérogène au sein de notre population. Si la Chancellerie pouvait avoir des experts en FALC qui traduisent déjà les bases des objets de votation cela nous donnerait la possibilité d’investir plus de temps ensuite à l’adaptation de ces documents.

Si la Chancellerie pouvait avoir des experts en FALC qui traduisent déjà les bases des objets de votation cela nous donnerait la possibilité d’investir plus de temps ensuite à l’adaptation de ces documents.

C’est une situation fascinante  la personne passe d’une prise en charge où tout est décidé pour elle à une position où c’est elle qui prend des décisions avec les risques qui accompagnent cette prise de décision. Ce changement de paradigme ne doit néanmoins pas être une source de difficultés supplémentaires pour les personnes.

 

 

 

 

 

 

Nous avions par exemple une personne très enthousiaste dans le groupe qui a décidé soudainement de ne plus continuer car elle se sentait stressée. Nous devons faire le chemin avec la personne, en fonction de ce qu’elle peut faire et donner.

Pilar Blanco  : Les personnes avec déficience intellectuelle sont passés d’un contexte de non-sollicitation à une sur-sollicitation. Leur donner la possibilité d’avancer à leur rythme, tenir compte de l’environnement et ne pas trop les surcharger est dès lors essentiel. Pour vous donner un exemple, au lieu de faire une séance de trois heures nous allons faire trois séances d’une heure à une semaine d’intervalle chaque fois.

Sandra Rigotti  : Notre métier est en train de changer. Cela pourrait être le rôle de la Chancellerie car cela concerne une grande partie de la population et pas seulement les personnes avec déficience intellectuelle. C’est une première approche facilitante pour tout un chacun.

Pilar Blanco : Nous sommes dans un moment très riche pour les milieux professionnels et nous devons réfléchir à comment préparer au mieux les équipes. Qui doit prendre cette responsabilité ? Est-ce notre rôle ? Un des objectifs de notre projet est de collaborer avec la Chancellerie et d’autres établissements socio-éducatifs du canton de Genève car actuellement chacun fait le travail dans son coin.

Un autre objectif serait aussi de préparer les personnes concernées à aller à l’extérieur, dans l’espace public, à écouter les conférences et qu’elles se sentent à l’aise pour poser des questions.

 

L’interview dans sa version intégrale est parue dans le numéro de décembre 12/2021 de Pages Romandes, commandable  par email à sarah.cornaz@bluewin.ch

 

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